L’écoute d’une œuvre me donne souvent envie de me mettre au piano et de jouer. J’aime parfois jouer l’œuvre, ou improviser en étant à l’écoute de ce qu’elle m’inspire. 

Travailler à partir de la musique des autres ça peut être un exercice de style (et pourquoi pas), mais c’est aussi se créer des occasions de jouer avec ce qu’elle nous inspire et de se laisser traverser.  On peut laisser l’idée originale s’imprégner de notre background, de notre histoire, de nos gouts musicaux pour quelle ressorte, tout autre ou juste légèrement transformée. 

Quand j’entends une musique qui me plait et que je veux l’utiliser comme support de mon travail, je procède souvent comme cela : 

– je sélectionne un passage qui me plait

– je l’analyse

– je choisis un paramètre (par exemple l’harmonie)

– je me demande ce que je peux en faire ou simplement j’écoute mon envie du moment. Quel effet cette harmonie me fait-elle et comment me donne-t-elle envie de jouer ?

 J’improvise avec ça ou j’invente des séquences que je transpose dans tous les tons. 

C’est l’approche que j’essaye de transmettre quand j’enseigne et que je m’applique aussi. 

Il est impossible alors de s’ennuyer ou de manquer d’inspiration. 

Mon inspiration du jour c’est Rachmaninoff et son premier concerto.

Arriver à jouer ce qu'on a en tête

Je vais l’utiliser pour régler un des problèmes majeurs qui peuvent se présenter quand on veut improviser. Ce problème c’est qu’on arrive pas toujours à jouer ce qu’on a en tête. C’est-à-dire être capable d’imaginer une mélodie qui nous plaît mais de ne pas arriver à la jouer directement au piano. Les doigts ne se posent pas aux bons endroits. Il peut se passer la même chose avec une suite d’accords. 

Vous allez voir que grâce à Rachmaninoff et l’écriture très systématique du thème de son concerto, nous allons pouvoir progresser dans cette problématique. 

Vous pouvez entendre ici le thème joué à l’orchestre puis joué au piano. 

C’est un thème construit en 8 mesures. Ce qui m’intéresse dans sa construction c’est qu’il utilise des idées qu’il répète sous forme de marches harmoniques et mélodiques 

Pour en savoir plus sur les marches vous pouvez lire mon article sur la musique du dessin animé il était une fois l’espace. Elle est écrite par Michel Legrand. Cliquez ici 

Ce qui est super dans les marches c’est le côté « boucle ». Une marche peut se développer à l’infini, c’est un avantage et un inconvénient. C’est pour éviter le côté répétitif qu’en général les compositeurs s’interdisent de reproduire une marche plus de deux fois. En effet ils craignent l’ennui que pourrait provoquer une musique trop prévisible. On peut constater que Rachmaninoff reproduit une seule fois la première  idée puis passe à une seconde idée plus courte qu’il reproduit une fois pour conclure ensuite avec 2 mesures finales elles-mêmes constituées de motifs plus petits et transposés.

Nous allons utiliser la première idée  pour explorer notre clavier dans tous les tons. Ce travail sera utile pour améliorer notre oreille mélodique et harmonique. 

Entraîner la relation entre oreille mélodique et clavier

Niveau 1 : transposer la mélodie à l’oreille

Pour commencer, apprenez à jouer le premier motif en do car c’est une tonalité plus facile que l’originale. L’idéal serait de pouvoir le chanter. 

Ensuite vous aller chercher à jouer ce thème en partant de la note sol. Pour ce faire essayer de retrouver les notes à l’oreille. Vous essayez des notes jusqu’à trouver la bonne. C’est une méthode un peu longue mais très efficace pour travailler l’oreille. 

Voici la solution :

Continuez en démarrant la mélodie à partir de ré puis la puis mi. Enfin, retrouvez d’oreille la suite. Pour éviter de trop monter dans l’aigu, revenez régulièrement vers le grave quand vous commencez une nouvelle transposition

Niveau 2 : transposer par l’analyse

Le début de la mélodie est construit à parti d’un accord mineur avec une note de passage entre la tonique et la tierce. Vous pouvez déjà transposer la première mesure en pensant à ça. Dans la deuxième mesure le fa# est attiré vers le sol qui est la prochaine note de départ de la mélodie. Mais il n’y va pas tout de suite, il passe d’abord par la tierce (sib) avant de descendre vers le sol par l’intermédiaire du la (note de passage). 

Cette mécanique d’analyse permet avec la pratique de transposer très rapidement et sans erreur.

Niveau 3 : Transposer avec la basse

On va ajouter la main gauche en jouant les basses. Vous pouvez le faire à l’oreille ou analyser le cheminement harmonique. Ici ce qui est intéressant c’est que l’accord de A-7b5 appartient à la tonalité de do mineur et de sol mineur. C’est un accord pivot qui permet de moduler. Cette prise de conscience est d’une grande aide pour transposer facilement. 

 

Apprendre à retrouver une suite harmonique

Niveau 1 : jouer l’accord mineur dans tous les tons

Vous allez juste prendre l’accord du début (do mineur) puis retrouver cette couleur mineure en partant de sol puis de ré puis la etc. On suit un cycle de quinte ascendantes. Vous pouvez chercher ces accords à l’oreille ou en mesurant l’intervalle entre les notes de l’accord. 

Niveau 2 : utiliser tous les accords du thème

On ajoute l’accord A-7b5. Il ressemble beaucoup au do mineur. Puis on ajoute de D7 qui est la dominante de sol permettant la transposition. Jouez les accords à la main gauche à l’état fondamental (sans la b13) puis ajoutez la mélodie à la main droite. 

Voici la solution dans tous les tons :

Niveau 3 : harmonisation à deux mains

Plutôt que de jouer les accords uniquement à la main gauche on va répartir les notes au deux mains pour un résultat plus harmonieux. 

Cette harmonisation permet de travailler notamment la b9 et b13 sur l’accord 7. 

Sur l’accord D7 le fa# est doublé, c’est à dire qu’il est joué deux fois en même temps. Ce n’est pas un gros problème car à la main droite la mélodie va rapidement sur le sib (b13). mais ce n’est pas optimal. Je vous propose donc de retarder l’arrivée du fa# à la main gauche en restant un peu sur le sol. On créé alors un accord 7sus4. On a alors un très bel effet avec le sol à la main gauche qui se résoud sur le fa#  puis le sib à la main droite qui se résout sur le la.  

Niveau 3+ : improviser sur la grille

C’est une grille très sympa pour improviser. Comme les accords passent rapidement je vous invite d’en doubler la durée. Vous pouvez soit improviser sur la suite de transposition complète soit uniquement sur deux tonalités. Cela fonctionne très bien et c’est ce que je montre à la fin de la vidéo. 

C’est le moment d’aller la regarder. Comme d’habitue elle complète bien l’article et vous permettra d’entendre tout ce dont je viens de vous parler. 

Merci de partager et de vous abonner à la chaine.

À demain

Cet article a 2 commentaires

  1. Jazzhelene

    Merci pour ce tutoriel très didactique qui décomplexe le pianiste de formation classique qui aborde l’ impro jazz sur les ii V I
    Tes vidéos sur la gamme mineure mélodique sont également très interessantes à mettre en pratique et en français !

    1. Jean-Christophe

      Merci, n’hésite pas à me dire s’il y a des sujets qui pourraient t’intéresser 🙂

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